Descriptif
Primordial, essence, quintessence… Ces mots résonnent en moi comme des sources d’inspiration. Retrouver le moment primordial. S’appuyer sur les racines d’une forme, d’un geste. Toucher l’essence. Goûter la quintessence…
Sans cesse, dans notre quête du mouvement, de la sensation, du son, de la parole, de l’émotion, de l’instant juste, le questeur, l’artiste, l’artisan, le maître d’œuvre, retournent à la source, fait émerger l’essence, comme s’ils accomplissaient ce mouvement pour la première fois, qu’ils ou elles, étaient le premier homme, la première femme, à l’aube de l’humanité.
Sans cesse trouver cette fraîcheur, ce neuf, ce primordial, cet instant sacré, cette innocence.
Regarder l’autre, celui ou celle que l’on aime, comme si c’était la première fois. Se lever, se réveiller, respirer, se redresser, voir, entendre, manger, marcher, ressentir chaque appui, le déroulement de chaque cheville, chaque fascia… Comme si c’était la première fois.
A mon sens, tous les arts énergétiques du mouvement devraient cultiver cette perception. Peut-être même tous les arts martiaux. Comme un éternel renouveau. En Yoga, en Qi Gong ou en méditation, ce sentiment est si présent. Si intimement lié à la pratique. Il anime toutes ces disciplines d’une profonde et intime beauté. Mais un aspect me chagrine.
Comment, nous autres pratiquants pouvons-nous confondre si souvent l’ancien, le traditionnel avec la source ? Comment pouvons-nous imaginer ou prétendre — comme c’est souvent le cas, et parce que nous avons longuement cultivé cette croyance dans de nombreux domaines — que la seule chose qui vaille soit ancienne ? La source est par essence immanente, toujours présente, à chaque instant. Elle ne se rattache aucunement au passé. Elle est et vit dans le temps. Toujours nouvelle, actualisée. Sans cesse renouvelée.
Et c’est vrai. Pas besoin d’avoir déjà aimé pour aimer. Nul besoin de connaître la « tradition amoureuse »!? Alors pourquoi en serait-il autrement pour nos pratiques corporelles et énergétiques issues de traditions millénaires ? Bien sûr qu’il est ici question de transmission d’un savoir. Bien sûr que les anciens ont développé des techniques, une gestuelle, ont assimilé et intégré des principes essentiels, nés de découvertes et d’années d’expériences. Pourquoi s’en priver ? Bien sûr que tout ce savoir est une richesse, voire un guide. Mais croire systématiquement en son efficacité, et souvent aux dépens de techniques et de disciplines contemporaines est, je le pense, profondément source d’erreur. D’ailleurs tout le monde sait bien qu’on ne se bonifie pas toujours ...