Descriptif
Les Mongols entrent dans l’histoire médiévale de l’Occident avec fracas, lors des conquêtes de l’empereur Gengis Khan. Ceux que les Européens nomment alors les Tartares sont redoutés pour leur archerie montée, mais aussi pour leurs cohortes de lutteurs implacables. Aujourd’hui, les Mongols pratiquent encore la lutte traditionnelle, qui constitue un sport aussi populaire que médiatisé mais toujours fort d’une symbolique rituelle. Au pays du Ciel bleu, la lutte (bökh barildaan) constitue, avec l’archerie et les courses équestres, le plus populaire des « trois jeux virils » qui font de la fête nationale une immense réjouissance. Pendant la période estivale, à l’occasion des Naadam, toute la population de la steppe converge à cheval, à moto ou en voiture vers les hameaux. Ces fêtes laïcisées à la période communiste (1921-1990) trouvent leur origine dans les sacrifices claniques de jadis, devenus revues militaires au Moyen Âge, puis rituels religieux après l’introduction du bouddhisme aux XVIe et XVIIe siècles. Dans ces événements se reflète – particularité de la Mongolie contemporaine – un amalgame de croyances chamaniques, d’apports lamaïques et de vestiges du communisme soviétique. Durant le plus majestueux des Naadam, associé à la fête nationale, les 11 et 12 juillet, un tournoi de lutte a lieu au sein du modeste stade en bois et en briques des quelque 350 villes et villages que compte ce pays trois fois vaste comme la France. On admire alors le déploiement de techniques guerrières très anciennes, mais aussi et surtout la valeur symbolique de cet art martial.
Un patrimoine ancien
La lutte est connue des nomades d’Asie centrale depuis au moins le XIe siècle. Sa pratique régulière dès le plus jeune âge fait des Mongols du Moyen Âge de redoutables fantassins en plus d’habiles cavaliers. Indispensable en temps de guerre, la lutte dévoile aussi sa particularité en temps de paix en prouvant la vitalité de la communauté. Comme l’indique l’Histoire secrète des Mongols (texte épique du XIIIe siècle qui relate l’histoire de la dynastie gengiskhanide naissante), des princes résolvent même leurs différends en laissant s’affronter leurs champions pour éviter de guerroyer. En 1844, le lazariste français, Evariste Huc, rapporte, dans ses Souvenirs d’un voyage dans la Tartarie et le Tibet, les dires d’un cavalier mongol à propos de lutteurs à l’entraînement : « C’est l’exercice favori de tous les habitants de notre pays de Efe, nous disait-il ; chez nous on n’estime que deux choses dans un ...